
Le parrain corse, le repenti et la communicante
Le Monde 03/2018
Sa silhouette, toujours dans l’ombre des puissants pris dans les tourments médiatico-judiciaires, n’est pas passée inaperçue à la cour d’assises d’Aix-en-Provence, en cette mi-février. Anne Hommel, dirigeante et fondatrice de la société de communication Majorelle, connue pour avoir conseillé Dominique Strauss-Kahn, Jérôme Cahuzac ou l’oligarque russe Dmitri Rybolovlev, avait une fois de plus les intérêts d’un homme de pouvoir à défendre.
Un homme au profil assez éloigné des clients qu’elle a l’habitude d’accompagner : présenté par la police judiciaire comme le parrain de l’équipe dite du Petit Bar (dont certains membres ont déjà été condamnés pour extorsion, trafic de stupéfiant ou tentative d’assassinat), exerçant son emprise mafieuse sur la région d’Ajaccio et au-delà, et accusé d’avoir commandité l’assassinat d’Antoine Nivaggioni, un ancien nationaliste corse reconverti dans les affaires.
Déjà défendu par Pascal Garbarini et Emmanuel Marsigny, deux avocats pénalistes expérimentés, Jacques Santoni, 40 ans, a décidé de s’adjoindre les conseils d’une communicante, dessinant encore un peu plus en creux l’envergure qu’il a pris ces dernières années. Ce partenariat surprenant signe aussi une évolution chez les professionnels de la communication judiciaire qui se gardaient bien jusque-là de prendre le risque d’être associés à des figures du crime organisé.
S’agissait-il, comme l’explique le site de l’entreprise Majorelle dans la présentation de ses missions de lui faire « bénéficier d’un accompagnement de qualité pour ses relations avec la presse » ? Contactée par Le Monde, Anne Hommel n’a pas donné suite. Selon nos informations, la communicante s’est activée auprès de plusieurs médias pour faire valoir les arguments de la défense avant l’ouverture du procès après avoir rencontré Jacques Santoni pour mettre au point une stratégie. Il s’agissait, par exemple, d’insister sur le parcours de la victime qui entretenait aussi bien des liens avec les milieux nationalistes ou affairistes qu’avec la police.
Une initiative d’autant plus justifiée pour Jacques Santoni que ce procès où témoignait le premier repenti de l’histoire judiciaire française a été très médiatisé pour un dossier de banditisme. Si la société Majorelle a été amenée à le conseiller, c’est aussi qu’elle était déjà intervenue auprès du cabinet Garbarini à l’occasion des mésaventures de l’acteur Benoit Magimel, un autre de ses clients. Celui-ci s’était retrouvé en garde à vue après avoir été interpellé en train d’acheter de la cocaïne.
Plusieurs membres de l’équipe du Petit bar ont été condamnés début mars à des peines allant de cinq ans de prison avec sursis à trente ans ferme pour leur rôle dans l’assassinat d’Antoine Nivaggioni. Jacques Santoni n’ayant pu se présenter à l’audience pour des raisons médicales -il est tétraplégique depuis un accident de moto-, son cas a été disjoint. Les dates pour l’audience le concernant n’ont pas encore été fixées.